Si les récents attentats suicides survenus à nouveau en Israël placent du point de vue israélien autant d'obstacles sur le chemin de la paix, d'autres développements sont de nature à susciter des réactions semblables dans le camp palestinien.
Ce point sensible est un site dont l'importance symbolique est considérable aux yeux des deux camps, puisqu'il s'agit de l'esplanade des mosquées, appelée par les juifs le Mont du Temple, puisque se dressait là autrefois le sanctuaire central de la religion juive.
C'est le site de la mosquée Al Aqsa, qui donna son nom à la seconde intifada, déclenchée alors par la visite d'Ariel Sharon sur les lieux à la fin du mois de septembre 2000. A la suite de cet événement, en octobre 2000, les responsables de la fondation islamique (waqf) en charge du site décrétèrent une interdiction d'entrée pour les non musulmans.
Depuis quelques mois, cependant, les signes se multiplient que les autorités israéliennes entendent bien rendre le site à nouveau accessible à tout visiteur et d'autoriser les juifs non seulement à le visiter, mais à y prier.
En janvier 2003, le premier ministre Sharon n'avait pas caché ses intentions à cet égard. En février 2003, le commandant de la police du district de Jérusalem avait déclaré ne voir aucune raison de maintenir les mesures interdisant l'accès du site à des non musulmans. Il avait suggéré que le meilleur moment pour procéder à cette démarche se situerait après l'attaque contre l'Irak.
Le 14 mai 2003, Tzachi Hanegbi, ministre de la Sécurité publique, s'est dit certain que le moment d'ouvrir à nouveau les lieux aux visiteurs était proche. Il a expliqué espérer qu'un accord permettrait de parvenir à une solution, mais a confirmé l'intention d'aller de l'avant même sans accord. Et de rappeler que le Mont du Temple avait accueilli auparavant des centaines de milliers de visiteurs sans incident (Haaretz, 14 mai 2003).
Certes, mais les événements survenus depuis semblent avoir quelque peu changé la donne. Les autorités musulmanes réagissent avec nervosité. Adnan Husseini, directeur du waqf, a expliqué que les non musulmans ne seraient pas les bienvenus. Plus exactement, ils doivent se borner à visiter le site, "seulement visiter", rien de plus: "Ce lieu est une mosquée, et la mosquée est un lieu pour la prière des musulmans." (Haaretz, 16 mai 2003)
De même, le Sheikh Ikrema Sabri, mufti de Jérusalem, s'est insurgé par avance contre toute tentative israélienne d'"usurper" les lieux saints. Car la crainte des musulmans est bien entendu de voir arriver plus que des touristes. Comme on le sait, il y a régulièrement des tentatives de groupes extrémistes de s'introduire sur le site pour y poser la première pierre du "Troisième Temple" (ce qui exigerait la destruction des lieux de culte musulmans). Les Fidèles du Mont du Temple ont ainsi fait du site le centre de leurs revendications.
Des milieux plus larges, moins extrémistes et moins impatients, espèrent néanmoins que le temple sera un jour rétabli, ce qui représenterait un signe messianique. Pour des raisons eschatologiques, des groupes millénaristes chrétiens attendent pour leur part avec espoir le rétablissement du Temple.
Une campagne se développe depuis quelque temps pour la réouverture du lieu. Un groupe prétendant être des hommes d'affaires américains anonymes – qui affirmaient n'être pas eux-mêmes des juifs religieux – avaient ainsi financé au début de cette année des annonces radiophoniques pour renforcer dans la population la conscience de l'importance du site, autour du thème: "Mont du Temple – cœur de la nation".
Mais l'un des conseillers de Yasser Arafat a lancé le 18 mai 2003 un clair signal d'alarme: la réouverture du Mont du Temple aux non musulmans pourrait bien déclencher une troisième intifada…